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L’endométriose peut-elle être associée à d’autres maladies chroniques ?

Relu par Dr Erick Petit, radiologue expert en endométriose, fondateur et responsable du centre de l’endométriose du GHPSJ, président de RESENDO

Comme si les symptômes et désagréments liés à l’endométriose ne suffisaient pas, il peut arriver que la maladie s'acoquine avec d’autres pathologies. Un phénomène au doux nom de comorbidité dont l’analyse ici n’a pour but ni de vous démoraliser, ni de vous alarmer mais de vous informer et de vous orienter si vous vous interrogez à ce sujet. Difficile de faire le tri entre tous nos symptômes, de savoir si ce qu'on identifie est lié ou pas à l'endométriose, si on doit se soucier de certains symptômes qui pourraient être liés à une autre maladie... si on doit en parler ou pas à notre médecin (la réponse est toujours oui !), un vrai casse-tête. On va donc essayer de clarifier un peu tout ça.

Avant de nous lancer dans le récapitulatif des maladies chroniques touchant plus fréquemment les personnes atteintes d’endométriose que l’ensemble de la population, petit reminder : vous n’avez ou n’allez pas forcément développer l’une des conditions listées ci-après, le risque est juste légèrement plus élevé. Vous remarquerez d’ailleurs que certaines des comorbidités citées sont des symptômes de l’endométriose. 

  • L’infertilité

La comorbidité la plus évidente est sans nulle doute l'infertilité. Si les couples sans endométriose ont en moyenne 15 à 20% de chances de procréer chaque mois, les femmes atteintes d’endométriose ont quant à elles en moyenne entre 2 et 10% de chances de tomber enceinte par mois. Avec évidemment, une diminution progressive, l’âge avançant, que l’on soit atteinte d’endométriose ou pas. 

Le lien de causalité endométriose/infertilité n’est pas encore très clair. Mais il existe une nette corrélation puisqu’une femme infertile a 6 à 8 fois plus de chance d’avoir une endométriose qu’une femme fertile, que “25 à 50% des femmes infertiles ont une endométriose”, et que “30 à 50% des femmes avec une endométriose sont infertiles”.

Les fameuses Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin (ou MICI pour les intimes) semblent souvent présentes chez les femmes ayant une endométriose. Parmi les MICI on retrouve principalement deux maladies : 

  • la maladie de Crohn
  • la rectocolite hémorragique

Le syndrome du côlon irritable, ou colopathie fonctionnelle, fait partie intégrante de l'endométriose et est à distinguer des MICI car ne présente pas de lésions sur les organes digestifs. Les examens, notamment la coloscopie, étant systématiquement normaux et donc totalement inutiles, ne sont à effectuer que lorsque il y a une réelle suspicion de MICI. On dit que le risque de syndrome du côlon irritable est considéré comme au moins deux fois plus élevé avec une endométriose que chez les femmes qui ne sont pas atteintes.

  • L’obésité

Le lien entre obésité et endométriose n’est pas directement établi. Parmi les facteurs de risque associés à l’endométriose, il semblerait même plutôt que les femmes avec un faible IMC aient plus de chances de développer une endométriose. Cependant, cela ne signifie pas que l’obésité protège de l’endométriose, bien au contraire, un IMC élevé semble entraîner des formes plus graves de la maladie.

  • Le cancer

L’endométriose est associée à un risque relativement plus élevé pour certaines formes de cancer, comme le cancer de l’ovaire (1,3 fois plus de chance d’en développer par rapport à la population générale), le mélanome (cancer de la peau), le cancer de la thyroïde (4% de risque supplémentaire) ou le cancer du sein. Mais l’endométriose est associée aussi à une diminution du risque d’autres cancers, comme celui du col de l’utérus ou de l’endomètre. 

Toutefois relativisons ! Avec une endométriose, le risque de développer un cancer reste très faible, inférieur à 1%. L’instance européennes qui fournit des recommandations sur la prise en charge de l’endométriose explique d’ailleurs aux médecins qu’il n’y a pas besoin de faire un dépistage systématique de cancer en cas d’endométriose. L’endométriose fait elle-même penser à un cancer, les lésions pouvant se trouver sur divers organes et grandir. Il y a néanmoins une grande différence, et pas des moindres : on n'en meurt pas, même sans traitement.  L’endométriose est donc dite bénigne et les lésions peuvent se définir comme des “métastases bénignes”. 

Aucun lien de cause à effet entre endométriose et cancer n’a été prouvé. Il existe pourtant des facteurs de risque communs aux deux maladies : jeune âge aux premières règles, ménopause tardive, infertilité, stress chronique… 

ATTENTION : avoir une endométriose ne signifie absolument pas que vous allez avoir un cancer, le risque relatif est très faible. Il n’y a donc pas lieu de mener un dépistage du cancer plus régulier chez les personnes souffrant d’endométriose que pour l’ensemble de la population.

  • Et ce n’est pas tout à fait fini…

L’endométriose est aussi associée à un risque relativement plus élevé de maladies gynécologiques (fibromes utérins, adénomyose…), d'allergies diverses notamment sur le plan alimentaire, d'asthme,  de douleurs (fibromyalgie, migraine, spondylarthrite ankylosante…), de maladies auto-immunes (maladie de Hashimoto alias hypothyroïdie, polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux systémique, sclérose en plaques, psoriasis et rhumatisme psoriasique…), de cystite interstitielle, d'infections urinaires, du syndrome de la fatigue chronique, de sensibilisation centrale (dysfonctionnement de votre système nerveux), d'AVC et de maladies cardiovasculaires. 

Pour finir, l’endométriose, les symptômes, les douleurs, leur fréquence, les peurs liées à la maladie ou encore l’infertilité peuvent être à l'origine de troubles psychologiques comme la dépression et l’anxiété. Compte tenu du parcours chaotique et douloureux que la maladie implique, ce n’est ni étonnant, ni honteux, ni un signe de faiblesse. Au contraire, ce qu’on retient, c’est la force de toutes celles qui font face comme elles peuvent aux nombreux assauts de la maladie et se battent comme des lionnes pour une vie meilleure. 

Tout ce qui compte encore une fois, c’est l’accompagnement et le soutien. Quelles que soient vos craintes et interrogations vis-à-vis d’éventuelles autres maladies, n’hésitez pas à en faire part à des praticiens spécialistes de l’endométriose. Et surtout, gardez en tête que l’endométriose s’accompagne de symptômes divers, qui ne sont pas forcément évocateurs d’autres maladies. Vous pouvez aussi trouver du soutien auprès des associations de patientes, des groupes de soutien, et évidemment auprès de nous ! 

Sources

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Autres références : 

“Idées reçues sur l’endométriose” du Pr Charles Chapron et Yasmine Candau - janvier 2018 - Editions Le Cavalier Bleu

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