Vous avez entendu parler d’endométriose en écoutant un podcast, sur un post Instagram, en discutant avec une amie, ou en suivant plus ou moins discrètement la conversation de votre voisine dans le bus ? Promis, on ne juge pas, on le fait aussi. Mais après avoir entendu parler de cet « endo-truc », vous vous posez des questions : et si j’étais concernée ? Et si j’avais l’endométriose sans le savoir ? De nombreuses femmes découvrent leur endométriose tardivement, avec un retard de diagnostic moyen de 7 ans. Alors pour réduire l’errance médicale, il faut parler de la maladie, sensibiliser les femmes aux symptômes qui doivent mettre la puce à l’oreille. Petit portrait-robot de l’endométriose.
Les symptômes caractéristiques de l’endométriose sont :
Bien sûr, ces symptômes isolés peuvent mener à d’autres possibilités. Mais lorsque certains d’entre eux s’additionnent, ou sont particulièrement marqués, il faut envisager l’endométriose. Voyons ça en détail.
Quand on voit cette première petite « check-list » des symptômes de l’endo, on comprend vite que la douleur est au programme (oh joie). L’endométriose étant liée à l’activité hormonale des femmes, elle est de fait liée aux cycles menstruels. Du coup, dans une grande majorité des cas, l’endométriose se manifeste par des douleurs (super) fortes pendant les règles.
Selon la Haute Autorité de Santé (1) – HAS pour les intimes - ces douleurs se caractérisent par une intensité de 8 sur 10 ou plus, résistante aux antalgiques de niveau 1. Elles peuvent provoquer des absences régulières au collège ou au lycée, et bien sûr, au travail une fois dans la vie active. Tout un programme ! A noter que certaines femmes observent aussi des douleurs à d’autres moments du cycle : en amont des règles, ou durant la période d’ovulation, par exemple, voire sans lien avec le cycle.
Ainsi, l’endométriose se caractérise par des douleurs chroniques qui rendent la maladie tout simplement éprouvante : on estime que 70 % des femmes touchées par l’endométriose vivent avec des douleurs chroniques invalidantes (2) (3). Oui, c’est énorme. Enfin, pour épaissir le mystère, certaines d’entre nous vivent sans douleurs, voire sans symptômes, tout en ayant l’endométriose. Cette endométriose asymptomatique est souvent diagnostiquée en cas de projet de grossesse.
L’endométriose a une petite tendance à aller là où on ne l’attend pas… C’est pourquoi, de nombreuses femmes expérimentent des douleurs durant les rapports sexuels, mais ne s’en alarment pas outre mesure : sans savoir qu’il s’agit potentiellement d’une pathologie, on a toute tendance à se dire que c’est normal. On est un peu sensible et puis c’est tout. Du coup on adapte sa vie sexuelle, on préfère telle position à une autre, on vit avec.
Or, des douleurs pendant les rapports sont un des symptômes caractéristiques de l’endométriose. Notamment en cas de douleurs à la pénétration, et dans les positions qui favorisent une pénétration profonde. Selon le Dr. Erick Petit, dans une interview réalisée pour Info Endométriose (4) : « On estime qu’il y a jusqu’à 70 % des patientes atteintes d’endométriose qui ont des rapports sexuels douloureux, non seulement en profondeur, mais aussi par effet réflexe par contraction du périnée et contraction vaginale. »
Avant de parler de fertilité, rappelons qu’infertile ne veut pas dire stérile : on parle d’infertilité quand la grossesse ne survient pas après 12 à 24 mois d’arrêt de contraception, ponctués de rapport réguliers et non protégés.
Il existe de nombreuses idées reçues sur l’endométriose et la fertilité. Par exemple : « quand on a l’endométriose, on est forcément infertile. » Dans la réalité, on estime que 30 à 50 % des femmes touchées par l’endométriose souffrent d’infertilité (5). Il ne s’agit donc pas de la majorité des femmes atteintes d’endométriose. Néanmoins ce chiffre reste bien trop élevé pour ne pas envisager l’endométriose si vous rencontrez des difficultés à procréer.
Les études divergent à ce sujet, mais certains catégorisent l’endométriose comme la deuxième cause d’infertilité en France, après les troubles de l’ovulation ; d’autres estiment que c’est la première cause. Une infertilité fréquente donc, qui s’explique par les différentes conséquences que peut avoir l’endométriose sur le système reproducteur : lésions anatomiques, diminution de la réserve ovarienne, trouble de l’implantation embryonnaire, obstruction des trompes de Fallope…. Et on en passe.
Nous l’avons vu, les douleurs liées aux règles et/ou aux rapports sexuels sont des signes qui doivent alerter. Mais il y a certains symptômes dont on parle moins dans le diagnostic de l’endométriose : ceux qui prennent place entre les quatre murs de vos toilettes. Déjà parler des règles, c’est tabou, mais alors parler de nos aventures aux WC, c’est un autre level pour beaucoup d’entre nous (et pourtant, rien de plus naturel).
Toujours selon la HAS, on note dans les symptômes caractéristiques de l’endométriose des difficultés ou des douleurs à uriner, ou à aller à la selle. Ces symptômes ont tendance à s’accentuer durant la période des règles. On observe, ici encore, un caractère cyclique. Pour peu que les lésions d’endométriose aillent s’installer dans la sphère digestive, on peut aussi observer des troubles digestifs, caractérisés par une alternance diarrhée/constipation. C’est ce que met en lumière, entre autres, l’étude EndoVie : parmi les 1557 femmes atteintes d’endométriose interrogées, 52 % d’entre elles déclarent avoir des troubles digestifs.
Nous l’avons dit plus tôt dans cet article, l’endométriose est longue et éprouvante à diagnostiquer : il faut en moyenne 7 ans, bien souvent ponctués de douleurs et de grandes remises en question, à se demander si on est folle ou non. C’est pourquoi il nous paraissait important d’essayer de dresser un « portrait-robot » de l’endométriose, d’identifier ses traits principaux, d’aider à la reconnaître lorsqu’on croise son chemin. Quelques précisions s’imposent néanmoins :
- Ce n’est pas parce que vous avez un symptôme de manière isolée que vous avez l’endométriose ; ce n’est pas non plus parce que vous n’avez qu’un symptôme qu’il ne s’agit pas de l’endométriose (on sait, c’est un peu paradoxal comme logique). Chaque endométriose est unique, c’est une maladie à géométrie variable.
- Nous essayons dans cet article d’identifier les grandes lignes évocatrices de l’endométriose, mais il existe d’autres symptômes dont on parle moins, et qui peuvent mettre la puce à l’oreille : une fatigue chronique (ressentie dans 54 % des cas selon l’étude EndoVie (3)), des douleurs lombaires ou des membres inférieurs (48 % des cas, toujours selon la même étude), des saignements anormaux (45 % des cas) ou des troubles urinaires (25 % des cas). On note aussi des symptômes plus surprenants comme des douleurs à l’épaule pendant les règles.
Dans tous les cas, en cas de doute, mieux vaut en avoir le cœur net pour être prise en charge au plus tôt. Commencez par contacter une association de l’endométriose, qui pourra vous recommander des professionnels de santé formés sur la maladie dans votre région. Le choix du professionnel est important, puisque cette maladie est encore méconnue de certains médecins.
Après une première consultation et un examen clinique, le spécialiste pourra vous proposer une échographie pelvienne et/ou une IRM pelvienne. Si l’imagerie confirme la présence d’une endométriose, un suivi spécifique pourra vous être proposé. Si l’imagerie ne permet pas de valider la présence d’une endométriose, mais que les symptômes sont particulièrement évocateurs, une coelioscopie peut être proposée dans certains cas afin d’examiner de manière plus précise la présence ou non d’endométriose. Cette coelioscopie n’est toutefois pas nécessairement proposée, si le tableau clinique est jugé suffisamment évocateur par le professionnel de santé. Quoi qu’il en soit, si vous vous retrouvez dans les symptômes cités précédemment, ne restez pas dans l’ignorance, consultez !
(1) Synthèse des recommandations de bonne pratique, « Prise en charge de l’endométriose » Décembre 2017, https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2018-01/prise_en_charge_de_lendiometriose_-_demarche_diagnostique_et_traitement_medical_-_fiche_de_synthese.pdf
(2) Astrid Mephon, Chapitre 4 - Diagnostic clinique de l’endométriose, Editor(s): Erick Petit, Delphine Lhuillery, Jérôme Loriau, Eric Sauvanet, Endométriose, Elsevier Masson, 2020, Pages 23-25, ISBN 9782294767814, https://doi.org/10.1016/B978-2-294-76781-4.00004-1. ; Warzecha D, Szymusik I, Wielgos M, Pietrzak B. The Impact of Endometriosis on the Quality of Life and the Incidence of Depression-A Cohort Study. Int J Environ Res Public Health. 2020 May 21;17(10):3641. doi: 10.3390/ijerph17103641. PMID:
(3) Grande enquête EndoFrance, Gedéon Richter, Ipsos « EndoVie » sur le vécu de l’endométriose, Février 2020. https://www.ipsos.com/sites/default/files/ct/ news/documents/2020-07/endovie_dpgrandpublic_v2c_maq3.pdf
(4) Interview du Dr Erick Petit par Info-Endométriose dans le cadre d’une campagne de sensibilisation : https://www.youtube.com/watch?v=-UTKnm4VCrQ
(5) Practice Committee of the American Society for Reproductive Medicine. Endometriosis and infertility: a committee opinion. Fertil Steril. 2012 Sep;98(3):591-8. doi: 10.1016/j.fertnstert.2012.05.031. Epub 2012 Jun 15. PMID: 22704630.